Derrière ce mot cryptique se cache en fait un plat bien connu : le riz au curry (“curry rice” japanisé), mais dans sa version japonaise.
Le curry a été introduit au Japon entre la fin du XIXème siècle et le début du suivant, pendant l’ère Meiji, où il était encore perçu dans le secteur privé comme une cuisine de luxe pour les riches. À cette époque, le sous-continent indien était sous domination coloniale britannique. Il est fort probable que les Britanniques aient introduit le mélange d’épices appelé poudre de curry au Japon par l’intermédiaire des marines respectives de ces pays. Le mot curry a probablement été adopté dans la langue japonaise sous le nom de karē à la fin des années 1860, lorsque le Japon a été contraint de sortir de son isolement et est entré en contact avec l’Empire britannique . Dans les années 1870, le curry a commencé à être servi au Japon en tant que “yōshoku” (plat occidental), souvent contenant des pommes de terre du fait des pénuries de riz de l’époque, et a depuis 1905 été réinventé avec des ingrédients de la cuisine japonaise dès lors qu’il devint un plat abordable. On ne trouva néanmoins du curry en poudre dans les grands magasins qu’à partir de 1920 et le premier pain au curry en 1927.
Le plat que nous vous proposons ici repose principalement sur la préparation d’un roux au curry à base d’huile (et non de beurre comme souvent chez nous). Cela lui donne un aspect plus fluide et permet une cuisson plus longue. Si on voulait simplifier à l’extrême, le kare raisu pourrait être un bourguignon épaissi avec du roux au curry. Ce roux a été commercialisé en 1945 sous forme de cube et le curry japonais s’est rapidement répandu dans tout le Japon comme un plat qui pouvait être facilement préparé à la maison ou la cantine scolaire. Il fut ensuite amélioré au fil des années comme en 1963 avec des pommes et du miel que l’on retrouve dans notre recette. Le japon produit désormais plusieurs milliers de tonnes par an de curry et le plat a détrôné les sushis et les tempuras dans sa fréquence de préparation depuis l’an 2000. On le voit d’ailleurs souvent dans les mangas quand les protagonistes sont au restaurant.
A noter que, dans chaque famille la recette, diffère un peu. Il y a en effet une base inébranlable dans ce plat mais aussi beaucoup de “gouts cachés”, qui est un vrai concept dans la cuisine japonaise. Nous en avons compilé beaucoup dans notre recette, sans que ça ne devienne n’importe quoi :-). Le vin par exemple n’est pas systématique, de même que les ingrédients de 1963. Itadakimasu !